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Introduction à la méditation Vipassana : une méditation pour la vie de tous les jours

par S.N. Goenka | Publié le 25 septembre 2003

L’héritage de Bouddha consiste en un art de vivre détaché de la souffrance. Ce n’est pas une religion, mais une méthode pour éviter la souffrance. Cette méthode repose sur la maîtrise de l’esprit, dans sa concentration et dans sa pureté.

« […]
Les gens sont agités. Pour échapper à l’agitation, il faut connaître la raison première de l’agitation, la raison première de la souffrance. Ceux qui ont entrepris de chercher la vérité sur la souffrance, la cause première de la souffrance, ont vite réalisé ceci: chaque fois que l’on développe dans l’esprit une négativité ou une impureté quelconque, on devient forcément agité. Une négativité de l’esprit, une impureté de l’esprit ne peuvent aller de pair avec la paix et l’harmonie.

Comment commence-t-on à engendrer de la négativité? On se sent agité quand des choses ne se produisent pas comme nous le désirons, quand des événements non désirés se produisent ou quand des choses désirées n’arrivent pas à cause de tel ou tel empêchement. On commence alors à engendrer des négativités, des souillures.

Ainsi, pour échapper à ces impuretés, ces négativités, cette agitation et ces souffrances, on peut essayer de veiller à ce que tout arrive dans la vie exactement comme on le veut, exactement comme on le désire… ce qui est impossible. Même si le plus grand dirigeant de tout l’univers essayait de faire en sorte que les choses soient exactement selon ses voeux, il ne le pourrait.

Des choses se produisent sans arrêt en contradiction avec nos désirs, à l’encontre de nos voeux. En dépit de cela, comment pouvons-nous demeurer en paix, maintenir notre harmonie intérieure? De nombreux Sages et Saints ont trouvé une solution à ce problème. Mais quelqu’un, parvenu à l’Illumination comme le Bouddha, est allé au fond du problème et a trouvé une excellente méthode pour venir à bout du manque d’harmonie et de l’agitation intérieure.

Certains Sages ont trouvé la méthode suivante: chaque fois que l’agitation s’empare de l’esprit, dirigez simplement votre attention ailleurs. Quelque chose que vous ne désiriez pas est arrivé et vous commencez à éprouver de la colère, de la haine, de la mauvaise volonté et de l’animosité. Essayez simplement de dévier votre attention sur quelque chose d’autre, et vous verrez que vous pouvez sortir de votre état de misère. Allez simplement boire un verre d’eau, votre esprit est diverti par quelque chose d’autre. Ou bien commencez à compter un, deux, trois, quatre… ou encore, si vous avez beaucoup de foi et de dévotion en une déité, un dieu ou une déesse, commencez à répéter le nom de ce dieu, de cette déesse ou de cette déité… l’esprit est diverti. Vous êtes débarrassé de cette agitation.

Une solution était trouvée. Cela marchait.

Mais pour quelqu’un ayant atteint l’état de totale Illumination, il apparaissait que ce n’était pas la bonne solution. Oui, au niveau conscient, l’esprit est diverti et se sent délivré de l’agitation. Mais plus profondément, aux niveaux semi-conscient et inconscient, l’agitation continue. Les impuretés continuent à proliférer. Et de temps à autre, il y a des éruptions volcaniques qui sont incontrôlables.

Non, le Bouddha découvrit que la solution réelle du problème était celle-ci: ne fuyez pas les problèmes. Une échappatoire n’est pas une solution. Faites face au problème. Observez-le simplement. Ne faites rien. Observez-le, rien d’autre. Quand une négativité s’élève dans l’esprit, colère, haine, envie, passion, peur ou toute autre impureté, commencez à l’observer. Ne la supprimez pas. La supprimer créerait plus de complications, plus de complexes. Ne lui donnez pas non plus libre cours. C’est un autre danger qui vous amènerait à un autre extrême. Ni suppression, ni libre cours. Ne faites qu’observer. Et vous verrez que vous en viendrez à bout facilement.

C’était la bonne solution. Le Bouddha l’employa pour lui-même et fut débarrassé de toute souffrance. Pendant son existence, un grand nombre de gens sortirent de leurs diverses souffrances et depuis vingt-cinq siècles, des millions et des millions de gens qui l’ont mise en pratique (y compris ceux qui la pratiquent de nos jours) ont réalisé que c’était une très bonne solution.Chaque fois qu’apparaissent colère, passion, peur ou toute autre impureté de l’esprit observez-la. Ne faites rien. Commencez à l’observer sans la supprimer. Vous n’avez pas engendré de nouveaux complexes et vous en sortez facilement.

C’est très facile de prêcher ce système, mais très difficile de le pratiquer. Quand s’élève la colère, elle nous submerge si rapidement que nous ne nous en rendons même pas compte. Quand nous sommes submergés par la colère, nous commettons des actions et nous prononçons des paroles nuisibles à nous-mêmes et aux autres.
[…]

Généralement, l’homme n’a pas l’habitude d’observer sa respiration ni ses sensations internes. Mais si l’on s’exerce à le faire cela devient très facile. Après quelques jours d’entraînement, on est capable d’observer la respiration telle qu’elle est: comment j’inspire, comment j’expire. Ce n’est pas un exercice respiratoire. Nous ne modifions pas la respiration. Il y a un autre système en Inde, nommé pranâyâma, dans lequel la respiration est modifiée. Cet exercice respiratoire a ses propres avantages mais il n’a rien à voir avec l’enseignement du Bouddha qui nous apprend à observer la respiration telle qu’elle est. Et avec un entraînement approprié pendant quelques jours, on est capable de sentir à travers tout le corps les sensations telles qu’elles sont, telles qu’elles apparaissent et disparaissent.
[…]

Plus l’on pratique l’observation de la respiration, l’observation des sensations, plus l’on s’approche d’une étape où l’esprit devient ultra pur. Alors, la vie change radicalement. L’esprit qui demeure toujours plein d’amour, de compassion et de joie rayonnante envers les autres, l’esprit qui demeure équanime tout le temps, ne peut jamais faire de mal à personne, ne peut rien faire ni en paroles, ni en actes qui puisse nuire à la paix, à l’harmonie, au bonheur d’autrui.
[…]

L’apprentissage de la concentration et de la purification de l’esprit est si universel que des personnes appartenant à quelque communauté que ce soit, à quelque religion que ce soit, croyant en quelque philosophie que ce soit, peuvent le pratiquer sans que cela ne fasse aucune différence entre elles.

[…] ”

Revue Française de Yoga, n°9, « Dhârana », janvier 1994, pp. 151-160.

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