La science des énergies dans la médecine indienne traditionnelle
Publié le 16 août 2005
L’Ayurveda, médecine holistique, se fonde sur les tri-dosha, les trois fluides qui animent l’organisme. De leur équilibre dépend la santé. Le traitement d’une maladie endogène, exogène ou saisonnière passe par des médicaments, un régime spécial et de l’exercice.
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L’Ayurveda
L’Ayurveda, aussi appelé science de longue vie, est une médecine holistique dans la mesure où elle considère l’homme dans sa globalité, en équilibre avec son environnement. Il y a équivalence entre le macrocosme et le microcosme; les mêmes lois d’organisation, de fonctionnement régissent l’homme et l’univers. Ainsi cette médecine est préventive avant d’être curative puisque l’attention est portée sur les interactions avec l’environnement, sur le mode de vie et sur les moyens de rééquilibrer les effets potentiellement déstabilisants de ces interactions.
Elle considère l’homme dans sa totalité, tant dans la sphère physique que psychique et spirituelle. La médecine doit aider l’homme à réaliser les quatre buts de l’existence, s’inscrivant dans une perspective d’évolution spirituelle et non seulement de soins.
« La bonne santé, le but de la profession, est la condition par excellence pour atteindre les quatre « fins » (Purushartha) de l’existence, à savoir le « devoir » moral (dharma), les biens matériels (artha), le plaisir sensuel (kama) et la réalisation (moksha). »
Caraka Samhita
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LA SCIENCE DES TRI-DOSHA
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Un modèle anatomique assez complexe s’est mis en place, où tout est défini en termes de fluides. Ceci dit, le terme de fluide doit être compris ici dans son sens élargi, c’est-à-dire non limité à son aspect liquide mais étendu à tout ce qui circule librement, incluant les formes gazeuses, d’énergie électrique, magnétique ou autres.
A la base de cette théorie fluidique sont les tri-dosha et l’ensemble des transformations subies dans l’organisme par les dhatu, tissus, est considéré comme réglé par le jeu combiné et l’équilibre du vent, du feu et de l’eau, présents et actifs dans le corps sous la forme de trois dosha, vata, pitta, kapha.
En effet, le vent moteur essentiel de l’univers, l’est aussi du corps où il est représenté par le souffle vital, le prâna ou vata. Le feu corporel, assurant la digestion et le métabolisme, est représenté par un principe igné qui se collecte surtout sous la forme de la bile, pitta. Quant à l’eau, elle se trouve sous la forme du kapha, le flegme ou la lymphe liquide organique, sérosités et sécrétions corporelles. Chacun de ces trois principes agit en revêtant cinq formes secondaires qui répondent aux différentes fonctions et manifestations vitales.
Le principe du vent se divise en prâna proprement dit, « souffle de devant », qui siège dans la tête, circule dans la poitrine et assure le contrôle des sens, la respiration et la déglutition ; udâna, « souffle qui va en haut », producteur de la parole ; samâna, « souffle concentré » qui fournit l’air nécessaire au feu intérieur pour cuire, c’est-à-dire digérer les aliments ; apana, « souffle qui va en bas », assurant les fonctions d’excrétion et l’accouchement ; enfin vyâna, « souffle diffusé » qui parcourt de toutes parts les membres et explique leurs mouvements.
Le feu est représenté par pitta sous cinq formes, pacaka pour cuire les aliments ; ranjaka qui donne sa couleur rouge au sang; sadhaka, siégeant dans la tête, donne l’enthousiasme et l’intelligence ; alocaka, qui brille dans l’oeil et permet la vue ; et bhrajaka, qui luit dans la peau et lui donne sa pigmentation et l’éclat de son teint.
Le principe aqueux siège surtout, et c’est kiedaka, dans l’estomac qui sert de centre à ses fonctions ; dans la poitrine, avalambaka, il maintient la fonction de la tête et des bras et soutient le cour; dans la gorge et sur la langue, bodhaka, il assure la gustation ; dans la tête, tarpaka, il favorise les facultés sensorielles ; et dans les articulations, sieshaka, il en assure la coaptation.
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Les théories sur lesquelles reposent l’Ayurveda peuvent donc se schématiser ainsi:
– du point de vue fonctionnel, référence aux trois dosha vata, pitta et kapha;
– du point de vue structurel, référence également à ces trois dosha, mais aussi aux sept dhatu et aux mala;
– du point de vue psychique, référence aux trois guna ou qualités :
. Rajas: action, mouvement, joie,
. Tamas : inertie, ignorance, tristesse,
. Sattva : équilibre, sérénité, connaissance.
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Pour une santé parfaite, ces trois dosha doivent être en équilibre.
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DE LA GESTION INADAPTÉE DES ÉNERGIES À LA MALADIE
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L’évolution de la maladie est divisée en six étapes, de l’accumulation sur place du dosha altéré, jusqu’à sa diffusion et localisation dans d’autres points du corps amenant à la maladie déclarée, puis chronique. Ce schéma général, applicable à tout processus pathologique, tient compte de la virulence du facteur étiologique, de l’intensité du déséquilibre, de la réaction de l’hôte, de sa faculté de défense, d’adaptation, de l’existence de points de faiblesse.
La Suçrutasamhita distingue trois grands groupes de maladies, subdivisés en plusieurs classes.
Le premier groupe est celui des maladies endogènes. Il comprend les maladies héréditaires et les maladies congénitales ou supposées telles, et surtout les maladies directement rapportées à l’activité des dosha.
Le second groupe est réservé aux maladies exogènes. Il s’agit essentiellement des traumatismes : blessures occasionnées par des armes, morsures d’animaux sauvages, piqûres d’insectes, etc.
Le dernier groupe comprend les maladies saisonnières ou résultant d’un processus naturel comme la vieillesse.
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L’ART DE SOIGNER
Pour ce qui est du soin, à la fois préventif et curatif, il repose sur une triade thérapeutique qui est la combinaison obligatoire des médicaments (aushadha), du régime alimentaire (ahara) et des exercices physiques (vihara). Ce traitement est ajusté suivant la nature du mal, sa gravité, sa localisation et la personnalité du malade.
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Revue Française de Yoga, n°15, janvier 1997, pp. 59-79