Rythme et énergie
Publié le 30 septembre 2003
L’énergie ne peut se définir en soi, et cependant elle est omniprésente et indéniable. Ainsi, le rythme des saisons qui changent manifeste bien la présence d’une énergie vitale. Le corps humain lui-même est le terrain d’action d’énergies diverses: l’état de nos organes, qui varie en fonction de nos émotions, reflète ces énergies à l’œuvre.
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Insistons-y, l’énergie est une, unique et quelque part indéfinissable. Elle doit s’accorder à la qualité propre au bon fonctionnement de chaque organe, de la même manière que chaque organe qualifie l’énergie qui le traverse, à la manière de la lumière, invisible sans un écran réflecteur et révélateur, à la manière de la lumière qui peut apparaître colorée de différentes façons suivant la nature même de cet écran.
Nous ne pouvons pas envisager, à proprement parler, une structure du corps de l’énergie. Par définition, l’énergie dans le corps physique, c’est la vie dans ce corps. Nous pouvons constater les effets de l’énergie, mais jamais nous n’en obtiendrons la moindre image. Quelle différence entre le cadavre et celui qui quelques minutes avant était un être vivant? Et pourtant rien n’est définissable et rien n’est manifestement ni visible et ni physique dans cette différence. Ce sont les effets de l’énergie et ses mouvements, qu’ils soient en harmonie ou perturbés, qui nous font conclure à une structure du corps de l’énergie, car notre esprit cartésien aime à visualiser, disséquer et aussi analyser les événements et les données d’un problème.
Le concept général d’énergie nous vient du grec « energeia » qu’il est possible de décomposer de cette manière « en » : dans et « ergon »: acte. L’énergie se définit ainsi comme la puissance et la force dans l’action et le mouvement. L’énergie est la fermeté et la résolution que l’on met dans ses actes, tout au long de sa vie. Le contraire, si nous voulions trouver un contraire, serait la faiblesse, la mollesse et l’incertitude, mais cette recherche du « contraire » serait discutable, car il s’agirait d’une « énergie d’inertie ». Bien entendu, en physique, la notion d’énergie est abstraite: manifestation de force, de mouvements, chaleur, champ électrique, etc. L’énergie est considérée en mécanique comme une aptitude à un travail.
Retenons donc que l’énergie est une puissance, une force d’action, une certaine fermeté dans nos actes, avec pour conséquence des effets notables et mesurables. Or c’est au travers « d’ambiances » que l’on donne le meilleur sens à ce concept. Les variations d’énergie ne sont en effet objectivables que par leurs propres mouvements.
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L’ensemble des conduits énergétiques, nadî, vaisseaux ou méridiens reçoivent leur énergie des trois foyers. Ces trois foyers sont aussi traduits par l’expression les « trois cuiseurs ». Il n’est pas nécessaire de les interpréter dans un sens métaphysique. Nous verrons que ce concept correspond à une intégration logique de l’énergie dans le corps de l’Homme.
L’idée de combustion véhicule celle de mutation, toute combustion n’étant en fait qu’une transformation. Pour qu’une combustion soit possible, mais aussi pour qu’elle aboutisse, il faut trois conditions: un combustible, de l’air et un moyen de « mise à feu », une étincelle. Les trois foyers représentent l’ensemble des fonctions énergétiques indispensables à la vie; ils président à la diffusion, dans le corps humain, de l’énergie contenue aussi bien dans l’air et dans les aliments solides, liquides ou, ne l’oublions pas, psychiques.
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L’ÉNERGIE DANS L’UNIVERS
S’il est impossible de définir l’énergie génératrice de mouvement, nous pouvons par contre en constater les effets, soit dans l’individu, soit dans son environnement proche ou cosmique. Nul ne peut échapper à ses effets et chacun le vérifie à sa manière, et suivant ses propres possibilités. L’étude pratique du cycle des saisons et des cinq éléments, tel qu’il est décrit dans de nombreux ouvrages, nous permet de vivre en accord avec les mouvements de l’énergie, et d’aborder en quelque sorte un « Yoga de la vie pratique ». La transformation de l’énergie, telle qu’elle est représentée par la « physiologie » des trois foyers est une véritable physiologie occulte qui tient compte des synchroniseurs externes, comme des réactions internes de l’organisme. L’énergie, prâna, est à l’origine de la vie de l’Homme, mais aussi de l’Univers; sa gestion est applicable par chacun, là où il se trouve, d’une façon si simple qu’elle ne demande ni étude, ni moyen financier exigeant.
Le printemps
Il suffit d’observer le rythme des saisons pour constater une des manifestations flagrantes de l’énergie dans l’univers. Nous pouvons en apprécier les effets au début du printemps; la puissance de sa manifestation est la plus importante à ce moment. La vitalité de la nature repart chaque année. De la même manière, notre corps réagit à ces changements par un bouleversement du comportement de la vie de nos cellules. Les Orientaux ne s’y sont pas trompés: ils ont placé le départ de l’année au début du mois de février. Les Occidentaux n’y sont pas restés insensibles: ils ont situé, dans leur calendrier la Chandeleur (« chant de l’heure ») le 2 février, marquant ainsi, par une fête profane d’abord, chrétienne ensuite, profane à nouveau, et oubliée depuis, que ce moment de l’année était d’une grande importance.
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La nature entière, humains, animaux, plantes, contribue au jaillissement printanier de la sève autant qu’à son sommeil hivernal. Dans un de ses ouvrages, le Dr P. Carton explique, par exemple, que, chez la plupart des gens qui ne commettent pas d’excès, ou encore qui ne sont pas en défaut grave, les poils du corps et les cheveux se renforcent à la fin du mois de mai, surtout les années de très fortes tâches solaires.
Il est donc important de se montrer » économe » en hiver, et de ne pas interrompre le rythme naturel de la vitalité et de l’énergie, notamment par des activités intempestives. Ceci remet en cause en quelque sorte des activités de sports d’hiver, ou encore d’hydrothérapie excessive, mal préparées; il en est de même pour les changements de climat en plein hiver. C’est au moment des deux changements annuels que nous avons signalés comme début et milieu de l’année, notamment entre février et juin, début de l’année, moment du printemps et de la « montée de la sève », que l’on peut observer les plus forts déclins de forces et de vitalité, soit chez les malades, soit chez les « pré-malades » que sont les sujets délicats. Les conseils de prudence, d’économie et de patience s’imposent surtout à ce moment de façon à mieux profiter de ce retour de la vitalité, apportée notamment par l’alimentation, la reprise d’aérothérapie, d’hydrothérapie et de cures solaires progressives. Insistons pour bien rappeler que l’année naturelle ne commence pas en fonction de la date du calendrier, mais bien avec le mouvement de la végétation, moment de la nidification des oiseaux, élan vital auquel doit participer la vie humaine.
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C’est par le dialogue avec son corps, le dialogue avec ses organes, que l’individu peut espérer une certaine « libération », même si celle-ci reste une « libération » modeste. Le travail, le repos, les loisirs doivent régler notre vie quotidienne, dans le respect des « horloges » externes représentées par le rythme de la journée, des saisons, de la vie. Tous les organes du corps et leurs viscères ne peuvent fonctionner d’une façon correcte que par des phases de travail et de repos, dépenses et recharges, en accord avec le rythme du soleil et des astres, si l’on veut appliquer un langage astrologique. Dans l’organisme, les rouages de la vie fonctionnent d’une façon automatique ou végétative, réglée par les centres nerveux sympathiques et parasympathiques. On préférera ici un langage énergétique, plus complet, car il inclut des incidences multiples. Le schéma varie automatiquement au cours de la journée et de l’année, en dehors de la volonté. Même sur des mécanismes automatiques, chacun peut agir, en bien autant qu’en mal, selon qu’il dirige avec plus ou moins de discernement le jeu de l’ensemble de ses activités. C’est sur le régime, le mouvement, l’activité, le repos que doit se concentrer l’attention de chacun, mettant en fonctionnement harmonieux un corps physique et un « corps » mental au service d’un corps spirituel.”
Revue Française de Yoga, n°15, « L’énergie en question », janvier 1997, pp. 125-152.